Journée mondiale du diabète - 14 novembre

Rétinopathie diabétique

Le diabète est en augmentation partout dans le monde. On pourrait s’attendre à ce que ses complications, notamment sur la vue, le soient également. Or les progrès du dépistage et des traitements permettent aujourd’hui de réduire le nombre des atteintes sévères. Explications avec le Dr Dafina Draganova, ophtalmologue aux CHU bruxellois de Brugmann et Saint-Pierre.

Quelles sont les maladies visuelles découlant du diabète ?

« Le diabète est d’une part un facteur de risque pour le développement d’une série de maladies des yeux présentes dans la population générale, et d’autre part, le facteur causal de l’atteinte oculaire appelée rétinopathie diabétique. C’est une des complications classiques du diabète. »

« Le fait d’être diabétique augmente le risque de développer : une cataracte, un glaucome, des infections oculaires, une sècheresse oculaire, une paralysie des muscles oculomoteurs, une neuropathie optique ischémique, et des occlusions vasculaires rétiniennes. »

Dr Draganova

Quelles sont les causes de la rétinopathie diabétique ?

« L’excès de sucre dans le sang fragilise les parois de tous les vaisseaux de petit calibre (capillaires) dans le corps. La vascularisation de la rétine est essentiellement assurée par ce type vaisseaux, raison pour laquelle elle est particulièrement sensible. »

« Les capillaires fragilisés perdent leur étanchéité et se bouchent. Ceci entraine d’une part une souffrance par manque d’oxygène (ischémie) de la rétine périphérique, et d’autre part, un gonflement (œdème) au niveau de la partie centrale de la rétine (macula). »

« L’ischémie rétinienne a tendance de s’étendre et aux stades avancés, elle provoque l’apparition de nouveaux vaisseaux rétiniens défectueux (stade dit prolifératif) qui peuvent être responsables de graves complications telles qu’un saignement intraoculaire, un décollement de la rétine ou un glaucome néovasculaire.

L’œdème du centre de la rétine entraine une baisse de l’acuité visuelle qui peut être importante et seulement partiellement réversible. »

Y a-t-il des signes avant-coureurs ?

« Il est primordial de savoir que la rétinopathie diabétique peut être complétement asymptomatique, jusqu’aux stades très avancés. Lorsqu’il y a une présence d’œdème maculaire, le patient peut remarquer une vision floue, une déformation des lettres à la lecture, une tache dans le champ de vision centrale, et des difficultés à percevoir les couleurs. » 

Comment prévenir ? Pourquoi est-ce important de dépister régulièrement ?

« La survenue de la rétinopathie diabétique peut être prévenue par un contrôle rigoureux de la glycémie, ainsi que des facteurs de risque cardio-vasculaires souvent associés au diabète (hypertension artérielle, dyslipidémie, tabagisme, syndrome d’apnées du sommeil). »

« Il est essentiel que les patients diabétiques effectuent un dépistage au moins une fois par an parce que la rétinopathie diabétique peut être asymptomatique. 

La découverte d’une rétinopathie au stade débutant (minime) est un signal d’alerte pour le patient et son endocrinologue. À ce stade, la rétinopathie est potentiellement réversible : un parfait contrôle du diabète et des facteurs de risque cardio-vasculaires peuvent la faire disparaître ou éviter qu’elle ne progresse. »

« La découverte d’une rétinopathie / maculopathie à un stade plus avancé mais en l’absence de complication majeure permet de traiter précocement et donc de conserver la fonction visuelle centrale et périphérique. »   

Tous les diabétiques développent-ils une maladie visuelle ?

« La réponse est « non ».  Chez les diabétiques de type 2, si le diabète a été diagnostiqué rapidement, donc si le patient n’est pas resté pendant plusieurs mois / années en état d’hyperglycémie avant d’être traité, et si le diabète et les facteurs de risque cardiovasculaires sont bien contrôlés, il est possible qu’il ne développe pas de rétinopathie diabétique. »

« La situation dans le diabète de type 1 est un peu différente à cause de la durée plus longue de la maladie chez ces patients qui sont atteints depuis l’enfance. Il est plus rare dans ces cas de n’avoir aucun signe de rétinopathie, mais encore une fois, un bon équilibre du diabète permet de limiter des dommages sur la rétine et de garder une fonction visuelle normale. »

Y a-t-il des catégories de la population qui sont plus à risque que d’autres ?

« Les personnes qui présentent plus de risque de développer une rétinopathie diabétique sont celles avec un mauvais équilibre de diabète, une durée de diabète plus longue, et qui présentent des facteurs de risque cardio-vasculaires tels qu’une hypertension artérielle, une dyslipidémie, un tabagisme, un syndrome d’apnées du sommeil. » 

Les maladies visuelles liées au diabète sont-elles en progression en Belgique ?

« La prévalence du diabète augmente au niveau mondial et la Belgique n’est pas une exception. Comme le nombre total de personnes diabétiques augmente, il est logique que le nombre de personnes atteintes de rétinopathie diabétique augmente aussi. Néanmoins, grâce aux progrès en termes de dépistage et grâce aux traitements disponibles et dispensés à temps, la proportion de patients atteints de rétinopathie diabétique sévère va diminuer. C’est déjà ce que nous observons en comparaison avec la situation d’il y a 20 ans en Belgique. » 

diabete_maculopathie

Quels sont les traitements possibles, quels résultats offrent-ils et quelles en sont les limites ?

« Le premier traitement de la rétinopathie diabétique est le contrôle le plus strict possible de la glycémie et des facteurs de risque cardiovasculaires. Avant de procéder aux traitements ophtalmologiques, il faut s’assurer qu’il y a un effort qui est fait dans ce sens. Une bonne communication entre l’ophtalmologue, le médecin traitant et l’endocrinologue est essentielle. »

« Lorsque le patient présente une rétinopathie diabétique à un stade avancé (pré-prolifératif sévère ou prolifératif), l’ophtalmologue procède au traitement par laser de la périphérie rétinienne. Le but de ce traitement est de stabiliser la rétinopathie et d’éviter des complications majeures. C’est un traitement effectué en plusieurs séances. Quand il est complet, il ne doit plus être refait. »

« L’œdème du centre de la rétine peut être traité par des injections dans œil (régulières et souvent chroniques) d’anti-VEGF  ou de corticoïdes, et/ou par laser.

Au stade des complications majeures, des traitements chirurgicaux sont parfois nécessaires. »

Le nouveau traitement anti-VEGF par injection dans l’œil existe depuis peu et semble offrir de meilleurs résultats que les autres traitements (amélioration de la vision, moins d’effets indésirables…) : qu’en est-il ?

« Les injections d’anti-VEGF sont utilisées pour traiter l’œdème du centre de la rétine. Elles sont efficaces et ont un bon profil de sécurité. Ce traitement est symptomatique et pas curatif. Il doit donc être répété très régulièrement. Par ailleurs, il existe une série de critères de remboursement qui doivent être remplis pour que le patient puisse en bénéficier (notamment un bon contrôle du diabète démontré dans la prise de sang). Même si ces injections ont beaucoup aidé dans la prise en charge de l’œdème maculaire, elles ne sont pas la solution dans chaque cas. Il y a toujours une place pour les autres modalités de traitement tels que le laser ou les injections de corticoïdes. »

Ces traitements sont-ils douloureux, contraignants, coûteux… ? 

« Les traitements laser se font en consultation. Un laser appliqué au centre de la rétine n’est pas douloureux. Le laser de la périphérie rétinienne peut être ressenti comme douloureux par certains patients. Actuellement, au CHU Brugmann, nous disposons d’un nouveau type de laser qui permet d’effectuer le traitement avec un excellent confort du patient. »

« Les injections intra-vitréennes se font sous anesthésie locale et dans des conditions de stérilité stricte en salle dédiée ou en salle d’opération. La sensibilité des patients est variable, mais la plupart ne ressentent qu’un léger inconfort au moment de la piqûre. »

« Les traitements peuvent être contraignants lorsqu’ils impliquent des visites fréquentes chez l’ophtalmologue. Il est important d’expliquer au patient le plan de traitement, et de discuter avec lui de la faisabilité de ce plan. Quand le patient est activement impliqué dans sa prise en charge, le traitement est perçu comme moins contraignant. »

« Au niveau du coût, en Belgique il y a une excellente prise en charge des traitements liés au diabète et ce facteur n’est pas limitant. »

Si vous deviez donner un conseil aux patients diabétiques, ce serait… ?

« On ne subit pas l’avenir, on le fait ». Vous pouvez agir sur l’avenir de votre santé et de votre vue en faisant tous les efforts possibles pour équilibrer votre diabète. Ne vous découragez pas, soyez motivés et optimistes ! » 

Merci au Prof. Postelmans pour sa relecture attentive.

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